L’inopposabilité du concordat préventif au créancier n’ayant pas été partie à celui-ci et recevabilité de son action en paiement de sa créance

IDEF-OHADA-24-455, Côte d’Ivoire, Cour d’appel du commerce d’Abidjan, arrêt numéro 332-2023 du 23 mars 2023, 1re chambre, la société REDACHEM A

IDEF-OHADA-24-455, Côte d’Ivoire, Cour d’appel du commerce d’Abidjan, 1re chambre, arrêt numéro 332-2023 du 23 mars 2023, la société REDACHEM AFRIQUE SARL contre la société AFRICAINE DE PRODUITS LAITIERS ET DERIVES en abrégé SAPLED

Procédures collectives d’apurement du passif : Créance antérieure impayée – concordat préventif d’une durée supérieure à deux ans – homologation et décision d’ouverture d’un règlement préventif au profit du débiteur – conclusion dudit concordat sans implication d’un créancier – action en paiement initiée par ledit créancier – recevabilité – oui - inopposabilité dudit concordat préventif à son égard– condamnation au paiement de la dette avec des dommages et intérêts de droit.

Application des articles suivants :

  • Article 10 de la loi ivoirienne n° 2016-1110 du 08 décembre 2016 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce
  • Articles 15 et 18 de l’AUPCAP
  • Articles 1315 et 1153 du Code civil applicable en Côte d’Ivoire

  1. La recevabilité de l’appel formé contre un jugement rendu à tort en premier et dernier ressort

Selon l’article 10 de la loi N° 2016-1110 du 08 décembre 2016 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce, « Les Tribunaux de Commerce statuent en premier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à 25.000.000 F CFA ou est indéterminé ». En l’espèce, il ressort de l’acte d’assignation introductif d’instance que l’appelante a sollicité la condamnation de la société intimée à lui payer la somme de 39.816.028 F CFA, outre les intérêts et frais. Ce montant étant ainsi supérieur à 25.000.000 F CFA, le tribunal de commerce d’Abidjan aurait dû rendre sa décision en premier ressort. Ne l’ayant pas fait, il a violé l’article 10 précité et sa décision, qualifiée à tort en dernier ressort, est susceptible d’appel. Par conséquent, le présent appel est recevable pour avoir été interjeté dans les forme et délai légaux.

  1. L’inopposabilité du concordat préventif au créancier n’ayant pas été partie à celui-ci

De la lecture combinée des articles 15 et 18 de l’AUPCAP, deux principales idées se dégagent : d’une part, le concordat préventif homologué s’impose à tous les créanciers antérieurs à la décision d’ouverture du règlement préventif ayant accordé des délais ou remises au débiteur.  D’autre part, ce concordat préventif peut être également imposé par le juge aux créanciers qui n’ont consenti aucun délai ni remise au débiteur, à condition qu’il n’excède pas deux (2) années. En outre, il s’en induit que le concordat ne peut être opposé au créancier dont la créance est antérieure à la décision d’ouverture du règlement préventif et qui n’a pas été partie audit concordat.

En l’espèce, s’il est vrai que la créance de l’appelante est antérieure à la décision d’ouverture de la procédure de règlement préventif, il ressort des énonciations du jugement du tribunal de commerce d’Abidjan ayant homologué le concordat que l’appelante n’y a pas été partie.  Par conséquent, ce concordat lui est inopposable et surtout qu’il comporte un délai excédant deux (02) ans.  C’est donc à tort que le premier juge a déclaré son action irrecevable, en excipant de l’admission de la société débitrice à la procédure de règlement préventif. Au regard de tout cela, il échet d’infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, rejeter le moyen d’irrecevabilité soulevé par l’intimée comme inopérant et déclarer l’action de la société appelante recevable.

  1. La condamnation de la société débitrice au paiement de sa dette

Il ressort de l’article 1315 du Code civil que l’exécution d’une obligation est subordonnée à la preuve de son existence. En l’espèce, il résulte tant des déclarations constantes des parties que de la facture en date du 29 avril 2021 produite au dossier, que la société intimée est redevable à l’égard de la société appelante depuis avril 2021 et qu’une partie de la dette reste impayée. Aussi, l’intimée n’ayant à aucun moment contesté ni l’existence ni le quantum de la créance, il convient de dire la demande en paiement bien fondée et de la condamner au paiement de la somme due.

Par ailleurs, de l’article 1153 du Code civil (ancien), il ressort que les dommages et intérêts, s’agissant d’une obligation de paiement de somme d’argent, sont les intérêts de droit courant au jour de la demande en paiement en justice ou de l’exploit de mise en demeure. En l’espèce, l’obligation dont l’appelante sollicite l’exécution consistant au paiement de numéraires, il convient de faire droit à sa demande en paiement des intérêts de droit calculés au taux légal à compter de la sommation de payer, servie à l’intimée le 24 mars 2022 et rejeter comme mal fondée sa demande en paiement de frais non prévus par lesdites dispositions légales.

Abstract : Issiaka YOUGBARE, Docteur en droit privé (Burkina Faso)

Référence pour citer l’abstract

Septembre 2024, note d’abstract rédigée par Issiaka YOUGBARE, « L’inopposabilité du concordat préventif au créancier n’ayant pas été partie à celui-ci et recevabilité de son action en paiement de sa créance », in www.institut-idef.org, www.jurisprudence-ohada.com  et www.librairienumeriqueafricaine.com, IDEF- OHADA-24-455, Côte d’Ivoire, Cour d’appel du commerce d’Abidjan, 1re chambre, arrêt numéro 332-2023 du 23 mars 2023, la société REDACHEM AFRIQUE SARL contre la société AFRICAINE DE PRODUITS LAITIERS ET DERIVES en abrégé SAPLED.

 

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