Le coup d’Etat militaire sanctionné par le gel des financements des partenaires étrangers : un cas de force majeure constituant une cause d’exonération de la responsabilité civile contractuelle

IDEF-OHADA-24-461, CCJA, Deuxième chambre, Arrêt Numéro 141-2023 du 29 juin 2023, Banque Populaire Maroco-Guinéenne dite BPMG-SA Contre Groupement d’E

IDEF-OHADA-24-461, CCJA, Deuxième chambre, Arrêt Numéro 141-2023 du 29 juin 2023, Banque Populaire Maroco-Guinéenne dite BPMG-SA Contre Groupement d’Entreprises Guinée ENCODI ENGECO-EGC-BAH et Fils, Mamadou Kaou BERETE, Thierno Moucar BAH et Sidy Mohamed BARRY

Coup d’Etat militaire :  cas de force majeure – cause d’exonération de la responsabilité civile contractuelle– suspension de l'exécution du contrat

 

Application des articles suivants :

 

- Article 13 AUS

- Article 190 et 193 AUS

- Article 127 et 128 AUS

 La responsabilité civile de la caution est subordonnée à la défaillance du débiteur et à l’existence de la créance

Au regard de l’article 13 de l’AUS, la caution n’est tenue envers le créancier que si le débiteur est défaillant, d’une part, et si la créance est fondée, d’autre part.  En l’espèce, il est établi que le débiteur n’a pas failli à ses obligations, en raison de la totale réalisation des travaux de réhabilitation des infrastructures sanitaires tels que spécifiés dans le contrat de marché.  Par ailleurs, la prise du pouvoir par l’Armée guinéenne, ayant eu pour conséquences le gel du financement des travaux confiés au Groupement d’Entreprises par l’Union Européenne et leur suspension entre 2008 et 2012, constitue un cas de force majeure, une cause d’exonération de responsabilité, ayant pour conséquence, entre autres, de suspendre les effets du contrat liant les parties. Par conséquent, tout prélèvement de frais de tenue de compte bancaire et agios opéré pendant cette période étant dépourvu de fondement, les cautions ne peuvent être appelées, au sens dudit article 13, à réaliser leurs garanties au bénéfice de la banque.

 La réalisation de l’hypothèque est conditionnée par la défaillance du débiteur

La réalisation de l’hypothèque est conditionnée par la défaillance du débiteur qui se caractérise par le non-règlement d’une créance qui existe, c’est-à-dire qui est certaine, liquide et exigible. En l’espèce, la créance des agios réclamée par la banque est contestée par le débiteur dans son fondement et, de ce fait, équivaut à une créance qui n’existe pas. Dès lors, elle ne peut entraîner la réalisation des hypothèques consenties.

 L’étendue des droits du créancier nanti

Le nantissement ne peut générer plus d’obligations que le contrat principal. En effet, les droits du créancier nanti ne peuvent être supérieurs à ceux que doit supporter le débiteur lorsqu’une partie de la créance n’est pas fondée et est contestée, comme le sont les prélèvements de frais de tenue et agios durant la période de gel du financement et de la suspension des travaux. Les agios et frais de tenue de compte étant tributaires des paiements du bailleur de fond, il va sans dire que si ces paiements sont arrêtés, en raison de la survenance d’un cas de force majeure, les comptes le sont aussi. A ce titre, le prélèvement des frais de tenue et agios ne devait pas être maintenu.

 La violation du principe du contradictoire n’est pas un cas d’ouverture du pourvoi devant la CCJA

Est déclaré irrecevable le moyen de cassation fondé sur la violation du principe du contradictoire, car celui-ci ne constitue pas un cas d’ouverture du pourvoi prévu par l’article 28 bis du Règlement de procédure de la CCJA.

 Sur l’omission de statuer

Il résulte de l’examen des différentes pièces du dossier qu’en considération de la contestation réciproque des parties sur les créances réclamées, plusieurs expertises ont été ordonnées et ont toutes révélé des trop prélevés opérés par la banque sur le compte du Groupement d’Entreprises qu’il convient de restituer. En se déterminant ainsi qu’elle l’a fait, la cour d’appel a effectivement statué sur cette demande, mais ne l’a pas trouvée fondée et l’a rejetée.

  

 Sur la dénaturalisation des faits de la cause

Il ressort des pièces du dossier de la procédure que la banque n’a pas été un simple domiciliataire dans cette opération, car elle avait également cautionné ladite opération en garantissant la bonne exécution des travaux entrepris par le Groupement et financés par l’Union Européenne. En outre, les paiements de cette dernière étaient soumis à un prélèvement automatique de la banque requérante qui en avait profité pour opérer des prélèvements indus qu’il convient de restituer. Selon les conclusions de l’expertise-comptable en date du 16 mai 2017, retenues souverainement par la cour d’appel, les prélèvements à rétrocéder audit Groupement s’élèvent à « 3.303.813.914 francs guinéens et 71.278,19 euros ». En condamnant alors la banque conformément aux résultats de ladite expertise, qui a l’avantage d’être complet et contre lequel celle-ci n’a fait aucun grief, la cour d’appel n’a aucunement dénaturé les faits.

Abstract: Arnaud SILVEY, Cabinet SIRE OHADA (Togo)

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Référence pour citer l’abstract :

Septembre 2024, note d’abstract rédigée par Arnaud SILVEY, «Le coup d’Etat militaire sanctionné par le gel des financements des partenaires étrangers :  un cas de force majeure constituant une cause d’exonération de la responsabilité civile contractuelle », in www.institut-idef.org, www.jurisprudence-ohada.com  et www.librairienumeriqueafricaine.com, IDEF-OHADA-24-461, CCJA, deuxième chambre, arrêt numéro 141-2023 du 29 juin 2023, Banque Populaire Maroco-Guinéenne dite BPMG-SA Contre Groupement d’Entreprises Guinée ENCODI ENGECO-EGC-BAH et Fils et autres

 

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