L’incompétence de la juridiction étatique en présence d’une clause contractuelle imposant le règlement amiable préalable de tout litige entre les parties
IDEF-OHADA-24-420, CCJA, Deuxième chambre, Arrêt numéro 002-2023 du 19 janvier 2023, Société SCHLUMBERGER SEACO INC Contre Société SENEV-TCHAD SA
Contrat-lettre d’intention matérialisant une relation d’affaires entre les parties : clause contractuelle de règlement amiable préalable de tout litige entre les parties – saisine de la juridiction étatique d’une action en responsabilité contractuelle – exception d’incompétence soulevée – omission ou refus de répondre à celle-ci – cassation – évocation – incompétence de la juridiction étatique – renvoi des parties au respect de la procédure préalable de règlement amiable choisie par elles
Application des articles suivants :
- Article 28 bis, 5ème tiret, du Règlement de procédure de la CCJA ;
- Article 19 de la lettre d’intention liant les parties
- Article 1134 du Code civil français de 1804 applicable au Tchad
Sur l’omission ou refus de répondre à des chefs de demandes relatifs à l’incompétence du tribunal de commerce
En examinant les pièces du dossier notamment des conclusions d’appel du 23 septembre 2020, on constate que la requérante a soulevé l’incompétence du tribunal de commerce en invoquant les dispositions des articles 19 de la lettre d’intention et 154 du Code tchadien de procédure civile. Cependant, dans l’arrêt attaqué, on ne trouve pas la réponse à ce chef de demande. L’omission ou le refus de réponse à des chefs de demandes étant un cas d’ouverture à cassation au sens de l’article 28 bis, 5ème tiret, du Règlement de procédure de la CCJA, il convient de casser l’arrêt déféré et d’évoquer.
Sur l’évocation
Sur l’incompétence du Tribunal de commerce
Aux termes des dispositions de l’article 19 de la lettre d’intention liant les parties, « la présente lettre d’intention est régie par les lois du Tchad et les parties conviennent que tout litige né de, ou en relation avec, la présente lettre d’intention sera d’abord résolue à l’amiable par les parties, faute de quoi il sera soumis à la juridiction exclusive de N’Djaména ». Selon cet article, la saisine de la juridiction compétente ne peut intervenir qu’après l’échec de la tentative du règlement amiable prévue par les contractants. Par ailleurs, l’article 1134 du Code civil pose que : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ». En l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier de la procédure, que cette étape préalable de règlement amiable ait été respectée. Dès lors, le tribunal, en retenant sa compétence dans le dispositif de son jugement, sans pour autant préciser dans les motifs de celui-ci, en quoi cette compétence est, en l’état, acquise, a méconnu la loi des parties. Il y a alors lieu d’annuler son jugement, d’évoquer et de statuer à nouveau en renvoyant les parties au respect de la procédure qu’elles ont librement choisie.
Abstract: Arnaud SILVEY, Cabinet SIRE OHADA (Togo)
-----
Référence pour citer l’abstract :
Mai 2024, note d’abstract rédigée par Arnaud SILVEY, « L’incompétence de la juridiction étatique en présence d’une clause contractuelle imposant le règlement amiable préalable de tout litige entre les parties », in http://www.institut-idef.org et Accueil Jurisprudence-OHADA , IDEF-OHADA-24-420, CCJA, Deuxième chambre, Arrêt numéro 002-2023 du 19 janvier 2023, Société SCHLUMBERGER SEACO INC Contre Société SENEV-TCHAD SA